L’effet du Brexit et des forces populistes sur les marchés financiers selon Mark Dowding

octobre 2018 - Transcription

Les marchés européens semblent volatils. Quelle sera l’incidence du Brexit sur la volatilité ?

Mark Dowding:

Eh bien, le Brexit a représenté toute une aventure jusqu’ici. Voilà deux ans que nous avons voté en faveur d’une sortie de l’Union européenne, et pour le moment rien ne s’est réellement produit. Mais la situation s’intensifie, les choses se bousculent, et la question devrait être en grande partie résolue au cours des prochains mois. En définitive, nous pensons que le Brexit sera très difficile à réaliser. À notre avis, la séparation sera ardue parce que le Royaume-Uni ne pourra pas obtenir ce qu’il veut et que l’UE n’a aucune raison de lui faire de cadeau. L’Union européenne ne veut pas faire quoi que ce soit qui encouragerait d’autres pays membres à partir, et nous pensons donc que, en tentant de conclure une entente avec l’UE, Theresa May a beaucoup de mal à établir un consensus, même au sein du Parti conservateur qu’elle dirige. Dans les prochaines semaines, nous risquons d’aller vers un Brexit dur, c’est-à-dire une sortie de l’UE sans accord, et c’est ce qui se produira si une loi ne peut être adoptée. Les citoyens du Royaume-Uni pourraient devoir envisager sérieusement les conséquences d’un Brexit dur avant que nous nous trouvions à un moment donné, peut-être plus tard, devant une fracture politique, ce qui mènerait au déclenchement d’élections. Cela pourrait conduire à la tenue d’un nouveau référendum. Il se pourrait aussi que le Brexit soit reporté pour un certain temps. Nous ne savons pas encore ce qui se produira. Ce que nous savons, c’est que même si bien des gens sont blasés au sujet du Brexit parce que rien ne s’est produit depuis le vote de 2016, la période de volatilité est encore devant nous et que nous devons nous préparer à saisir les occasions qui se présenteront. La situation offre un bon potentiel. Le cours des actifs au Royaume-Uni connaît de grandes fluctuations. Par exemple, si d’éventuelles élections mènent à la formation d’un gouvernement travailliste dirigé par Jeremy Corbyn, les taux des obligations pourraient facilement bondir au Royaume-Uni par rapport à leur niveau actuel.

Le populisme teinte plusieurs tendances politiques dans le monde. Quelles en seront les conséquences pour les marchés financiers mondiaux ?

Mark Dowding:

Le populisme est une tendance claire et importante sur la scène politique depuis quelques années, et à mon avis, cela s’explique largement par la stagnation du revenu moyen pour une bonne partie de la population. Les gens dont la situation ne s’est pas améliorée depuis dix ou 15 ans ressentent une frustration qui change leur comportement au moment du vote. Selon moi, le populisme s’explique par la constatation que, dans le contexte de mondialisation des dernières années, une part croissante du PIB a été affectée aux capitaux, au détriment de la part destinée aux travailleurs. Il se peut fort bien que cette part destinée aux travailleurs augmente dorénavant, ce qui se traduirait par une hausse des salaires, mais aussi par des difficultés d’investissement de capitaux. Si la part des travailleurs augmente, celle des capitaux diminue, ce qui ne serait pas favorable aux bénéfices des entreprises à moyen terme. Par contre, une hausse des salaires pourrait faire augmenter légèrement l’inflation, et donc les taux d’intérêt. Je pense donc que les tendances populistes auront des conséquences importantes sur les marchés financiers, mais aussi sur l’économie dans son ensemble. Le populisme est le fait de présidents ou de premiers ministres qui cherchent à donner au peuple ce qu’il demande, et je pense que la hausse des salaires est un enjeu central à cet égard. Si on prend un sujet comme l’immigration, l’intolérance face aux immigrants augmente, et c’est peut-être aussi le cas de la xénophobie, mais si l’on y regarde de plus près, l’érosion des salaires est au cœur de ces tensions sous-jacentes. Le commerce est également à l’ordre du jour. Ces tendances et la mondialisation sont défavorables aux politiques de libre-échange, et le commerce équitable fera davantage partie des questions de l’heure à l’avenir. En ce qui concerne un pays comme la Chine, je vois assurément des risques de baisse. Ayant rencontré des décideurs américains dernièrement, j’ai constaté une volonté de limiter la montée de la Chine en tant que superpuissance. Il y a une volonté de mettre un terme à l’hégémonie de la Chine, qui pourrait avoir bien peu de moyens d’éviter l’application de tarifs douaniers à l’ensemble de ses exportations. En ayant une bonne compréhension de ces tendances, en sachant qui sont les gagnants et les perdants, nous pouvons repérer les occasions à court et à long terme. En tant qu’investisseurs actifs, nous pouvons nous positionner pour repérer les occasions de produire de l’alpha.

Déni de responsabilité